Quelques souvenirs pêle-mêle de ce raid jurassien des 1er au 4 février 2018.
1- Noëlle se souvient :
Premier jour :
Fin de journée en mode ski de randonnée. Odile et moi ouvrons la voie. Personne n’a encore foulé la neige, nous faisons les traces. Ambiance sauvage dans une nature silencieuse aux arbres chargés de neige.
Nous nous approchons de l’arrivée, il fait presque nuit. Soudain, Odile me crie « Noëlle, je ne vois plus rien, je ne sais pas où est la piste ! ». Quelques secondes après, nous nous retrouvons toutes les deux les fesses dans la poudreuse !
Deuxième jour :
Pierre a besoin de plusieurs personnes pour passer un passage en dévers un peu délicat, mon guide va donc aider à la manœuvre. Je décide de partir à l’aventure toute seule.
La piste ne présente aucun danger et les traces sont très bien marquées. Je m’élance donc, sortant un ski de la trace lorsque je prends un peu trop de vitesse. J’éprouve un immense sentiment de liberté. Je suis seule (pour un petit moment au moins) au milieu de cette vaste étendue blanche, de la neige à perte de vue (la mienne ne va pas très loin) et aucun bruit sauf le léger chuintement de mes skis qui glissent sur ce velours étincelant et les battements de mon cœur qui résonnent dans ma poitrine.
Un peu plus tard, Dominique K me rejoint, il reste derrière moi dans les descentes un peu plus pentues et essaye de m’indiquer tant bien que mal « un peu à gauche… virage à droite ». Pas facile finalement sans un guide devant soi de prendre les courbes et les virages sans tomber. Je finis plusieurs fois le nez dans la poudreuse, mais la neige est tellement douce que ça m’est égal. Je ris même de bon cœur à chaque fois, me relève et continue dans ma lancée.
Encore un peu plus tard, nous nous retrouvons gaiement avec Michel, Brigitte, Dominique et moi à l’avant du groupe : trois miros et un lugeur, la joyeuse troupe que voilà !
Comme j’ai le sens du sacrifice (lol) je passe devant avec Brigitte et indique ensuite à Michel si « ça passe » ou s’il vaut mieux sortir un ski de la trace. Nous faisons comme ça un bon bout de chemin jusqu’à ce que le reste du groupe nous rattrape.
Troisième jour :
En attendant que les chauffeurs arrivent, nous décidons de faire des allers et retours sur la piste pour ne pas nous refroidir. Fabienne et moi sommes les premières à chausser, je lui propose donc de la « guider », et en avant, me voilà guide improvisée de la « terrible » Fabienne alors que je n’y vois moi-même presque rien !
Ça se passe plutôt bien, je me rends compte que le guidage, c’est du boulot ! Et qui plus est un boulot à plein temps ! Et oui, il faut que je lui parle sans cesse à ma petite Fabienne, sinon gare à moi, je vais me faire engueuler !!!
Dans ma tête, je me dis : « pourvu qu’elle ne tombe pas, je ne saurais pas comment l’aider à se relever » ! Mais elle ne tombe pas, et elle en redemande. Nous faisons ainsi plusieurs allers-retours, Fabienne est lancée, elle ne veut plus s’arrêter ! Je me surprends moi-même à lui répéter mot pour mot les conseils de Claude et Gérard : « Plie bien les genoux en descente… » et la rassure tout le temps : « Ne t’inquiète pas, je t’attends… ça descend tout doucement, tout tranquillement ».
Tout le monde est arrivé, je confie Fabienne à son guide, ravie de cette expérience insolite ; plaisir partagé par Fabienne, j’espère !
2- Danièle livre ses souvenirs :
Le Jura : le pays du ski de fond mais aussi des étendues parfois balayées par le vent avec des températures polaires ! Ça ne fait rien, nous sommes partis pour 4 jours de la Pesse jusqu’aux Rousses.
Il est tombé 40 cm de poudre dans la nuit, les pistes ne sont pas damées mais la neige est douce. Le groupe progresse lentement mais sûrement, nous sommes seuls dans la forêt dans le silence et la magie de cette poudreuse. Nous arrivons au gite à la nuit où une bonne soupe réconfortante nous attend.
Le lendemain matin c’est un décor de rêve qui nous attend : la pleine lune au-dessus des sapins enneigés puis un ciel bleu foncé et la vallée de Bellecombe sauvage et magnifique sous le soleil. Claude nous apprend que les habitants de cette commune s’appellent les Bellecombais, et les filles ? Nous repartons confiants, Gérard nous a dit « c’est vallonné vous verrez, c’est pas dur ! ». La piste est jalonnée de « bassines »laissées par Pierre ou Michel ou d’autres, difficile de tenir l’équilibre dans les dévers. Hervé me tracte puis me laisse aux mains de Claude dans la 1ère descente où nous effectuons un entrechat tout à fait réussi, on ne tombe pas ! La piste continue, ponctuée de coups de cul et de dévers, chacun chemine à son allure. Heureusement on a droit à une grande descente que j’effectue avec Gaston, mon super pilote ; on décoiffe Pierre et Jean-Luc au passage. A la pause, les salades d’Odile font l’unanimité.
Le soir, la maison des Inuits nous accueille avec un couscous « bon comme là-bas », nous dormons tous ensemble dans le dortoir, c’est sympa.
Le 3ème jour nous offre un profil plus adapté et tout le monde se fait plaisir. En passant le long du lac de Lamoura, nous imaginons le départ de la mythique « transju ». Le secteur est moins sauvage, nous traversons les pistes de ski alpin et nous recevons des encouragements au passage. Les nuages se déchirent, le soleil arrive et le paysage est somptueux avec les arbres chargés de neige et les ombres dessinées sur la neige.
Le soir à Prémanon, nous fêtons l’anniversaire de Gérard sur les paroles d’une chanson concoctée par Brigitte autour d’un apéritif pris en commun qui nous réchauffe car il fait froid dans le chalet.
Nous passons la dernière matinée aux Rousses. La neige est moins bonne, les pilotes sont fatigués, Dominique casse sa luge, il est temps d’arrêter.
Un dernier pique-nique, toujours aussi bon, et chacun repart plus fort avec dans la tête et dans le cœur la magie de ces quatre jours passés ensemble. La solidarité du groupe a permis à tous d’arriver à bon port !
3- Le compte-rendu de Gérard :
Jeudi 1er Février : Villard de Lans – La Pesse en voiture, La Pesse-gîte des Guignettes en ski
C’est le départ pour le Jura il est 7h 30. Je mets le nez dehors, il neige aux Glovettes, déjà 10 cm. Ce qui me fait changer d’itinéraire pour descendre à Grenoble. On roulait très mal, quelle bêtise que j’ai fait là ! Je suis rentré dans les bouchons, plus d’une heure de perdue. Nous avons roulé sous la pluie battante jusqu’à Bellegarde. Nous sommes arrivés à midi, les derniers ; pour des gens qui voulaient arriver en avance, c’est raté ! Après un pique-nique dans la salle hors sac de La Pesse qu’on avait retenue, nous sommes allés au départ de notre rando.
A chacun ses fonctions ; Odile et Hervé s’occupent des forfaits de ski, les guidés cherchent leurs guides, on aménage à coups de pelle à neige et d’huile de coude une rampe d’accès aux pistes pour les luges, enfin chacun y met du sien. Dominique et Odile font le transfert de voitures. Tout le monde a un peu froid, on décide de commencer à partir, les retardataires nous rattraperont bien. Au bout d’un kilomètre tout le monde est là, il y a de la poudreuse sur les arbres, cela nous offre des paysages féériques, on fait des photos. Tiens, Pierre vient de « cupeler » avec sa luge ! Ils sont 4 pour le relever, il est lourd : plus de 100kg ! La neige est très souple à skier. Cette fois, c’est Fabienne qui mange la neige. Tout se déroule tant bien que mal dans une bonne ambiance ; les fatigués sont ramassés par les voitures, les derniers arrivent au gîte des Guignettes vers 17h45. Il fait nuit.
Chacun prend son lit au dortoir. Le repas est à 19h 30. Le dortoir se trouve au dernier étage sous le toit ; les lits sont tous alignés les uns à côté des autres. Bonjour les ronfleurs ! La nuit s’est bien passée ; à propos de ronfleurs, nous avons eu le concert attendu mais sans plus il y a des ziiiiiii-zééééé comme quelqu’un qui scie du bois avec une scie à main, d’autres ont un ronflement comme un chien qui grogne avant de mordre, d’autres semblent souffler dans un tuyau étroit provoquant en fin de parcours un sifflement, puis il y a ceux qui inspirent fort et qui expirent en faisant le bruit d’un moteur de voiture en marche (mffff-brrrrr), ceux qui soufflent très fort puis plus rien et une minute après inspirent une pile de boulons dans un bruit effrayant. Bref à 8h, tout le monde est au garde à vous au petit déjeuner. Le ciel est dégagé, cristaux de neige brillant au soleil, il fait super froid.
Vendredi 2 Février : Les Guignettes – Lajoux en ski
10h départ du gîte des Guignettes
On prend son temps, nous partons du gîte des Guignettes il est presque 10h. Nous ne sommes pas partis au complet, certains chauffeurs s’occupant de transférer les voitures jusqu’au gîte du soir. Il fait très beau, les arbres sont chargés de neige, c’est splendide, le temps est très frais. Comme il nous manque les guides « chauffeurs », chacun s’aide. On voit Rachid mal-voyant guider Noëlle, elle a confiance. J’ai passé mon temps à guider, à pousser et retenir les luges en descente. Derrière nous, ça traine, je ne sais pas pourquoi ; j’ai appris par la suite que c’était Laurent qui était très fatigué. Ils ont dû l’arrêter en cours de route et trouver un blablacar qui l’a amené à la salle hors sac du pique-nique. De ce fait, ils n’ont jamais pu nous rattraper. Entre temps, il y en a 4 qui se sont trompés de parcours un kilomètre avant l’arrivée à Lajoux. Ils sont arrivés alors que nous avions presque fini de manger. Bien sur, c’est de notre faute, on s’est fait disputer ! L’après-midi, tout le monde a voulu rentrer au gîte des Inuits en ski, même les luges. Après le ski, certains sont allés au sauna, d’autres dans la salle de relaxation, d’autres enfin ont paraffiné les skis.
Pour un parcours que je leur avais annoncé facile, ils l’ont tous trouvé très difficile. Il est vrai qu’il y avait de grosses montées très raides et des descentes pas faciles à négocier.
Nous avons été bien reçus au gîte, les patrons sont nouveaux. J’ai annoncé le parcours du lendemain, pas trop dur pour leur remonter le moral ; personne n’a voulu me croire , tant pis !
Samedi 3 Février : Lajoux-Prémanon en ski
Départ en ligne sur le lac de Lamoura type départ TransjuLe temps est couvert, la météo ne semble pas très bonne d’après nos météorologues Odile et les autres fous de leur smartphone. Nous partons en voiture en direction du lac de Lamoura, lieu de notre départ. Après avoir tout déballé sur la piste de ski, bâtons, luges, baudriers, nous tournons en rond près du lac en attendant que les chauffeurs de voitures reviennent. Nous voyons Noëlle plus que mal- voyante guider Fabienne non voyante ; quelle confiance ! Pierre en fauteuil avec Jean-Luc qui l’accompagne ne sont plus là, ils sont sans doute partis !
Pourtant on avait insisté pour un départ groupé tous ensemble ; ils ont avalé la consigne ! Ça y est, tout le monde est là sauf notre couple de lugeurs. Nous faisons un départ en ligne mode Transjurassienne en avant-première au même endroit sur le lac. Sur la piste, les paysages sont imprenables, nous nous en gavons et remplissons les appareils de photos souvenirs. Le parcours n’est pas difficile, il y en a même qui font du supplément en faisant une boucle autour de la Serra. Nous rejoignons le site de la Darbella vers 13h ; nous déjeunons dans la salle hors sac. Certains reprendront les voitures, d’autres iront chercher les leurs, nous nous attendons au centre pour partir tous ensemble. Les lugeurs qui sont déjà installés ont des frissons en attendant ; ils me demandent s’ils peuvent partir. « Bien sûr, normalement vous prenez toujours à gauche, vous suivez les panneaux Prémanon. »
Arrive ensuite notre Laurent accompagné de Dominique T. Tout le monde est là ! Nous enchainons ; arrivés au bas de la combe, un croisement. Non ce n’est pas à gauche, c’est un peu plus loin ! Nous apercevons Laurent et Dominique ; demi-tour, c’est la prochaine à gauche. Pourvu que les luges n’aient pas pris à gauche ici ! C’est encore là que je me dis, il est important de partir ensemble …Nous arrivons à Prémanon. Marie-Laure nous attend. Les luges ne sont pas encore arrivées ; zut ils ont pris la 1ère à gauche, ça va rouspéter ! Tant pis ils n’avaient qu’à lire le panneau Prémanon. Même Laurent et Dominique n’ont pas pris la même arrivée que nous, pourtant ils étaient avec Claude et Hervé. Laurent a fait une descente pas possible sans accompagnement et sans tomber ! Tout le monde en reste sur le derrière ! Il est prêt à faire la Carole Montillet à Villard de Lans. Enfin, nous avons pu rentrer au centre de Prémonval tous sains et saufs !
Le soir nous avons fait l’apéro. Ils ont fêté mon anniversaire avec une petite chanson composée par Brigitte sur l’air de « Pour moi la vie va commencer…» Pendant que nous mangeons, je vois Brigitte et Dominique partir aux toilettes. Quand elles reviennent, je suis choqué par la poitrine proéminente de Dominique et le gros ventre de Brigitte. J’aurai l’explication plus tard : elles ont pris tous les rouleaux de papier wc pour les mettre dans les toilettes des chalets où cela fait cruellement besoin. Nous allons faire une bonne nuit bien méritée.
L’anniversaire de Gégé
Dimanche 4 Février : Aux Rousses – Retour Villard de Lans
C’est l’heure de ranger les affaires. On met tout dans les sacs, on fait le ménage dans les chalets ; puis nous partons faire notre dernière matinée de ski aux Rousses. Le temps est toujours aussi beau, mais sur le site de ski des Rousses il n’y a que peu de neige ; nous skions entre les taupinières et les plaques de glace. A midi, nous mangeons à la salle hors sac des Rousses. Chacun rentre chez soi après ce dernier pique-nique ………C’est fini …..
CONCLUSION :
La randonnée s’est bien déroulée, le temps nous a bien aidé, tout le monde semble content. C’est la première fois que nous faisons un raid en ski de fond avec les handisports. Nous avions Odile la grande réalisatrice du raid ; elle a organisé les gîtes, les salles hors-sacs pour les repas de midi, les pique-niques des déjeuners…. Moi je me suis juste occupé du parcours, je l’ai reconnu en un jour pour voir si cela était faisable pour les handis. J’ai mis sur le 1er jour difficile de par sa longueur, ses montées et ses descentes, sans oublier les traversées de routes communales. Le 2éme jour que je leur avais annoncé plus facile à ma grande surprise s’est montré beaucoup plus difficile tant il y avait de grosses montées et de grosses descentes plus que raides ! J’avais mal estimé la difficulté. Cela vient sans doute d’avoir fait la reconnaissance en skating sur une neige très glissante qui m’a trompé. On a parfois eu du mal à mener notre petite troupe. Le 3éme jour qui m’avait semblé long s’est avéré sans difficulté et facile pour tout le monde.
- Comme m’a dit Dominique Kespi : » La prochaine fois tu reconnaitras le parcours en luge avec un bandeau sur les yeux pour évaluer la difficulté avec précision… »
- Pierre Pauget qui est en luge semble satisfait de son raid en ski malgré ses multiples chutes où il a souvent mangé de la bonne poudreuse Jurassienne. Il nous a félicité « sans vous, je n’aurai jamais pu faire et n’aurai jamais pensé refaire ce que je faisais quand j’étais valide «
- Pareil pour Fabienne qui a bien tenu la distance. Quand à Rachid et Brigitte toujours dans la bonne humeur, ils nous ont bien aidés quand on était en difficulté avec les non-voyants. C’étaient des demi-miros qui guidaient les miros !
- Dominique Kespi jouait comme un enfant avec sa luge… »même pas peur »
- Claude Terraz qui n’a plus la responsabilité du club en tant que Président était détendu et content d’être avec nous ainsi que Dominique Traynard.
- Laurent égal à lui-même toujours de bonne humeur ; il nous a épatés tous, en se lançant dans des descentes où l’on attendait le scratch mais non , il ne tombait pas! Comment a-t-il fait ? Catherine sa femme bout en train et qui a toujours le sourire apprend à guider.
- Christine et Manu jamais à l’heure sont contents de leur raid.
- Marie-Laure et Hervé performants dans la logistique.
- Le couple Danièle et Gaston très discret, Gaston guide son épouse à la perfection.
- Jean-Luc et Gérard les deux nouveaux guides ont eu leur baptême du feu ; pour des débutants, ils ont été extraordinaires. Jean-Luc a guidé de bout en bout Pierre et sa luge, il y a eu pas mal de chutes. J’ai découvert les qualités de Jean-Luc dans ses sauts périlleux dans la poudreuse (il est très fort !)
- Quant à Noëlle et Michel notre Président, le couple père-fille qui se chamaille parfois durement lorsqu’ils sont ensemble se cherchent lorsqu’ils sont loin l’un de l’autre. En définitif, ils s’aiment bien ….je t’aime ; moi non plus !….