Impressions d’un novice à Bessans

Les impressions d’Yves Jouanneau, compétiteur novice à Bessans

Ce week-end de la mi-janvier, tous les membres de VHS en état de skier ont rendez-vous à Bessans à l’occasion du 40ème marathon de ski. Le faible enneigement du début de saison n’a pas permis plus de deux entraînements, et je ne me sens pas bien préparé à une épreuve de haut niveau ; de fait, c’est la première compétition à laquelle je vais participer, et je ne suis pas très rassuré.

La veille du jour fatidique de ma première course, Odile, Gégé et Michel passent me prendre à domicile en début de matinée. Peu après, nous filons vers la Maurienne par l’autoroute. En route, on discute du projet Finlandia, on blague sur le fartage exigeant que Noëlle a fait faire pour ses skis. Nous arrivons à Modane et observons que l’enneigement est plutôt léger, pas meilleur que dans le Vercors. Nous montons alors vers Bessans sur une route sèche que le chasse-neige n’a pas eu besoin de dégager depuis le début de saison. Nous arrivons à Bessans un peu avant midi, et dès que nous sortons de voiture, nous sommes saisis par l’ambiance hivernale du lieu : moins 18°C, neige qui crisse sous les pas, mais grand ciel bleu et soleil au rendez-vous.

Nous sommes hébergés à La Bessannaise, un grand site d’accueil pour les fondus de fond, avec 2 grandes salles pour le fartage et l’entreposage des skis, avec ouverture directe sur les pistes. C’est royal! Nous cassons la croute dans un salon de l’hôtel, et nous sommes rejoints par Marcel, qui a eu le temps de faire une boucle avant notre arrivée. L’après-midi, nous chaussons les skis classiques pour aller explorer quelques difficultés du parcours du lendemain. Gégé me guide derrière Marcel et Michel qui sont partis devant. A environ 3 km nous grimpons avec énergie une côte bien raide mais pas très longue qui se durcit sur les derniers mètres  et m’oblige à passer en canard. La piste se poursuit par une descente bien pentue mais large et toute droite: ça passe malgré un ressaut au milieu, un peu dur pour qui ne peut le voir et donc l’anticiper. Puis, Marcel nous entraine sur une autre boucle faite de plats et faux-plats, car c’est le caractère dominant des pistes dans ce fond de vallée.

Le soir, nous nous retrouvons avec les autres engagés de VHS autour d’une grande tablée dans la salle de restauration de la Bessanaise. Il flotte un subtil parfum de veillée d’armes, car le lendemain, il faudra se livrer à fond, tout donner sur l’épreuve de classique sur 15 ou 30 km selon la forme et l’ambition de chacune et de chacun. La nuit qui suit, j’ai du mal à trouver le sommeil: est-ce l’excitation de la course à venir, la chambre trop chauffée, l’altitude (>1600m), mon voisin qui ronfle ou tout cela réunit? Heureusement, Odile a eu une prévision rassurante pour la météo du samedi : la température du matin devrait repasser au-dessus des moins10°C.

Après une nuit agitée, j’ai du mal à me sortir du lit, et j’arrive au self quand Michel, Marcel et les autres ont presque fini de déjeuner. Incapable de trouver un plateau, je m’installe en bout de table devant mon bol ; au bout de quelques mn, je finis par me rendre compte que mon sachet de thé n’infuse pas dans l’eau chaude comme je l’aurais souhaité, mais dans un bol de lait tiède. Je recommence tout en choisissant du café, cette fois, c’est plus sûr et plus approprié pour me sortir du trou. Voyant mon désarroi, Elizabeth m’aide à finir de déjeuner en toute bienveillance.

Nous devons nous présenter sur la ligne de départ vers 9h30 avec nos dossards ; le départ des handis sera donné un quart d’heure avant tout le monde. VHS est bien représenté, en nombre tout au moins, avec 8 handis dont 2 partent pour le 30km, Noëlle et Rachid. Il y a aussi Anaïs de Lyon et un jeune sourd qui ne nous a pas été présenté. A quelques min du départ, la tension monte d’un cran, et nous avons hâte de nous élancer pour nous réchauffer. Au signal du départ, un coup de feu à vous péter le tympan, le jeune sourd détale comme un lièvre, nous ne le reverrons plus avant l’arrivée. J’emboîte le pas de Gérard Raffin qui me guide de sa voix rassurante. Après quelques mn, les écarts sont bien marqués. Michel et Rachid sont partis devant avec leur guide, Marcel et Gégé, et j’ai pris mon rythme de croisière. On passe la grosse bosse repérée la veille sans problèmes, mais je trouve le moyen de me casser la figure dans la descente qui suit. Les athlètes qui jouent la gagne, partis un quart d’heure après nous, nous rejoignent avant le premier ravitaillement, et passent comme des fusées. Après une petite pause et un thé chaud fort bienvenu, nous terminons le parcours de 15 km sans soucis, avec les encouragements de certains participants. Quelques instants après notre arrivée, les champions se disputent le finish du 30 km, commenté en direct par le journaliste qui s’égosille dans son micro, aussi essoufflé que les skieurs qu’il interroge.

De retour à la Bessannaise, on en profite pour récupérer, se détendre, puis, en fin d’après-midi, blaguer tous ensemble et relater les exploits de la journée.
Le lendemain, c’est l’épreuve reine, le marathon en skating, qui attire plus d’un millier de participants. A VHS, seuls Rachid et Gégé osent le défi, tandis que Michel, guidé par Marcel, et moi-même guidé par Gilles nous nous alignons sur le 21 km. Tous les autres feront le 10 km.

Il a neigé dans la nuit, et l’humidité, les rafales de vent rendent les conditions de course moins agréables que la veille. Nous ne sommes donc que trois binômes à prendre le départ des handis, un quart d’heure avant tout le monde. La glisse est moins bonne et dès le premier ravitaillement, je me rends compte que je vais en baver ; à la mi-course, j’ai du mal à garder le rythme malgré les encouragements de Gilles devant, et de Gérard qui nous accompagne. Les 5 derniers km me paraissent se prolonger indéfiniment, avec une longue montée suivie après un court répit par la grosse bosse du début à gravir une seconde fois. Là, je me fais doubler une autre fois par le groupe de tête qui passe en trombe : j’aimerais bien profiter de l’aspiration, mais autant rêver! Je finis sur les rotules, mais content de franchir la ligne d’arrivée, enfin.

La sono annonce l’arrivée de noms connus dans le monde du cyclisme, comme Thibaud Pineau un peu plus tard, celle d’un ancien champion italien qui boucle son énième marathon à plus de 85 ans. Chapeau, l’artiste! Cet homme est un exemple pour nous tous, comme Claude qui partage sa science de la glisse à chaque entraînement; j’ai conscience que le chemin sera long pour gagner en aisance sur les skis, mais j’ai 20 ans devant moi pour progresser !

Yves Jouanneau